De l’extension des droits de l’homme
L’approche intégrale de la pensée sociale de l’Eglise apporte à la situation des droits de l’homme une précision de grande pertinence quant à leur reconnaissance. Avec Jean-Paul II, l’on peut s’en faire une idée assez concrète. Il parle en effet du « droit à la vie…le droit de grandir dans le sein de sa mère après la conception ; (…) le droit de vivre dans une famille unie et dans un climat moral favorable au développement de la personnalité ; le droit d’épanouir son intelligence et sa liberté par la recherche et la connaissance de la vérité ; le droit de participer au travail de mise en valeur des biens de la terre et d’en tirer sa subsistance et celle de ses proches ; le droit de fonder librement une famille, d’accueillir et d’élever des enfants, en exerçant de façon responsable sa sexualité. En un sens, la source et la synthèse de ces droits, c’est la liberté religieuse, entendue comme le droit de vivre dans la vérité de sa foi et conformément à la dignité transcendante de sa personne »1 .
Le droit des droits que la pensée sociale de l’Eglise met en exergue est le droit à la vie, depuis sa conception jusqu’à sa fin naturelle .2 Cet évangile de la vie montre l’importance du respect de la vie contre toute théorie eugéniste, de légalisation de l’avortement ou d’euthanasie. Si nos parents s’étaient donnés la liberté de nous éliminer, ce serait un non-lieu de parler de la vie de tout un chacun de nous. A la lumière du prix qu’accorde la pensée sociale de l’Eglise à toute personne, on voit de façon concrète toute la dignité dont elle revêt chaque personne et le droit de vivre ainsi exprimé pour chacun et pour tous.
On peut également mettre en exergue particulièrement dans la liste des droits de l’homme énumérés plus haut le doit à la liberté religieuse. Le Concile Vatican II affirme sans ambages : « Tous les hommes doivent être soustraits à toute contrainte de la part tant des individus que des groupes sociaux et de quelque pouvoir humain que ce soit, de telle sorte qu’en matière religieuse nul ne soit forcé d’agir contre sa conscience, en privé comme en public, seul ou associé à d’autres »3 .
Cette affirmation de la liberté religieuse est à bien comprendre : elle ne signifie pas qu’il ne faut pas assurer une éducation religieuse aux jeunes générations. Elle leur en fait même un devoir, un impératif, comme responsabilité parentale bien assumée ; car la dimension religieuse est une dimension de la vie de l’homme. La plupart du temps, c’est précisément dans les vies où ce devoir d’une authentique éducation religieuse soucieuse de la dignité de l’homme n’est pas assumé, que se développe des idéologies peu respectueuses de l’autre. Car la religion, la vraie, se soucie de l’altérité. Aussi, la religion ne s’impose pas à des personnes adultes, capables de choix. Elle se propose. Toute religion qui s’impose par l’épée ou la guerre est un déshonneur pour l’humanité et la dignité de l’homme et ne respecte pas, par surcroît, les droits de l’homme.
Enfin, affirmer et spécifier les droits de l’homme ne doit jamais faire perdre de vue la responsabilité d’assumer ses devoirs envers soi, envers le prochain et envers la Transcendance.
Père Colbert GOUDJINOU
Directeur de l’IAJP/CO.
1- JEAN-PAUL II, Lettre Encyclique CentesimusAnnus, 47 : AAS 83, 1991, 851-852.
2- Cf. JEAN-PAUL II, Lettre Encyclique Evangelium Vitae, 2 : AAS 87, 1995, 402.
3- CONCILE VATICAN II, Déclaration DignitatisHumanae, 2, AAS 58, 1966, 930-931.