Vivre d’une foi incarnée, c’est aussi prendre soin de l’environnement
4è partie (1/2) : Vivre d’une foi incarnée par le soin à l’environnement
Partant de la conscience des appels que la question environnementale lance à la foi, l’attitude conséquente de l’homme, vivant d’une foi sincère et donc d’une foi incarnée est, à défaut d’enrayer le problème, de ne pas en rajouter. La collaboration à endiguer le problème l’entraine alors dans une transformation de mode de vie de pensée et d’action. Son engagement en attitudes concrètes prend corps grâce à une réelle décision de grandir dans une authentique solidarité à agir ensemble positivement et avec responsabilité avec les autres. La résolution des questions d’envergure planétaire nous fait en effet découvrir le caractère relationnel et interconnecté du monde. Tout est lié. Une spiritualité incarnée s’appréciera alors à sa capacité de nous insérer dans un mouvement planétaire où la foi fournit un surcroît de motivations pour une meilleure gestion des situations.
Dans le processus de toute foi authentique d’ailleurs, appel est fait à la conversion, et une conversion s’apprécie à des actions concrètes de changement. Le désert extérieur occasionné par l’action de l’homme dans son rapport à l’environnement est toujours, le signe d’un vide intérieur plus grand 1. La dimension holistique de la question est bien cernée par le pape François quand il dit : « La culture écologique ne peut pas se réduire à une série de réponses urgentes et partielles aux problèmes qui sont en train d’apparaître par rapport à la dégradation de l’environnement, à l’épuisement des réserves naturelles et à la pollution. Elle devrait être un regard différent, une pensée, une politique, un programme éducatif, un style de vie et une spiritualité qui constitueraient une résistance face à l’avancée du paradigme technocratique. » 2
La dimension de la foi entre donc en jeu dans la gestion de la question écologique, si la foi se veut vraiment incarnée. De ce point de vue, étant donné la vitalité de la foi au Bénin et en Afrique, la question à se poser est de savoir comment notre foi nous engage comme citoyens conscients des enjeux environnementaux. Parfois, c’est le cadre même du culte qui laisse à désirer quant au soin qu’on en prend. De toute façon, quelle que soit notre obédience religieuse, la sagesse humaine dont est pétrie notre religion se percevra dans l’impulsion ou dans les motivations qu’elle nous procure pour la gestion de la vie dans l’ouverture et la solidarité aux problématiques de la vie sociale.
Vivre réellement d’une foi incarnée nous entraine dans un changement de style de vie. Comme l’exprime le pape Jean Paul II, toute volonté de protéger et d’améliorer le monde suppose de profonds changements dans « les styles de vie, les modèles de production et de consommation…»3. Dans cet ordre d’idée, se sont développées la production et la consommation éthiques avec les marchés équo-solidaires, fruits concrets d’une conscience des questions d’attention au mode de production et de la participation à une chaîne de justice dans les processus de mise à disposition des produits. Tout cela est possible surtout si l’on est motivé par un profond sentiment de don de soi. Le Pape François le confirme : « C’est seulement en cultivant de solides vertus, que le don de soi dans un engagement écologique est possible. ». Et il poursuit :
Si une personne a l’habitude de se couvrir un peu au lieu d’allumer le chauffage, alors que sa situation économique lui permettrait de consommer et de dépenser plus, cela suppose qu’elle a intégré des convictions et des sentiments favorables à la préservation de l’environnement. Accomplir le devoir de sauvegarder la création par de petites actions quotidiennes est très noble, et il est merveilleux que l’éducation soit capable de les susciter jusqu’à en faire un style de vie. L’éducation à la responsabilité environnementale peut encourager divers comportements qui ont une incidence directe et importante sur la préservation de l’environnement tels que : éviter l’usage de matière plastique et de papier, réduire la consommation d’eau, trier les déchets, cuisiner seulement ce que l’on pourra raisonnablement manger, traiter avec attention les autres êtres vivants, utiliser les transports publics ou partager le même véhicule entre plusieurs personnes, planter des arbres, éteindre les lumières inutiles. Tout cela fait partie d’une créativité généreuse et digne, qui révèle le meilleur de l’être humain. Le fait de réutiliser quelque chose au lieu de le jeter rapidement, parce qu’on est animé par de profondes motivations, peut être un acte d’amour exprimant notre dignité. 4
Père Colbert GOUDJINOU
Directeur de l’IAJP/CO
1 - BENOIT XVI, Homélie pour l’inauguration solennelle du ministère pétrinien, 24 avril 2005 : AAS 97, 2005, 710 : « Les déserts extérieurs se multiplient dans notre monde, parce que les déserts intérieurs sont devenus très grands. »
2 - FRANCOIS, Lettre encyclique Laudato si’, 111 : AAS 107, n°9, 2015, 892.
3 - JEAN-PAUL II, Lettre Encyclique CentesimusAnnus, 58 : AAS 83, 1991, 863. Cf. Lettre Encyclique Laudato si’,
4 - FRANCOIS, Lettre Encyclique Laudato si’, 211 : AAS 107, 2015, n°9, 930-931. 5.