La valeur intrinsèque du travail
L’étymologie du vocable travail, tripalium, réfère à un instrument de torture. C’est l’indication du nécessaire effort dans lequel engage tout travail. Mais le travail, loin d’aliéner l’homme est fondamentalement le moyen d’humaniser son milieu, le rendant en mesure de satisfaire à ses besoins peu naturels. L’homme a en effet des besoins en raison desquels un travail d’élaboration est fait pour rendre la nature en mesure de combler les nécessités humaines presque toujours culturellement élaborés.
Aussi quel que soit le type de travail et le domaine où il est fait, l’importance du travail lui est conférée par la dignité intrinsèque à toute personne humaine. C’est ce qu’exprime Jean-Paul II dans la lettre encyclique LaboremExercens : « Le fondement permettant de déterminer la valeur du travail humain n'est pas avant tout le genre de travail que l'on accomplit mais le fait que celui qui l'exécute est une personne » . 1
La personne étant une « substance individuelle de naturelle rationnelle » pour reprendre la classique définition de Boèce, elle est unique, irrépétible et nantie de droits inaliénables. La conception que l’on se fait de lui, de sa dignité, préside alors au respect qu’on lui doit dans son travail.
Le travail confère alors de la dignité à l’homme, étant entendu qu’il est son effort d’humanisation de son milieu de vie et correspond au plan providentiel de Dieu dans la création. Le récit de la Genèse parle en effet du mandat donné à l’homme à la création : « soyez féconds et prolifiques, remplissez la terre et soumettez-là » (Gn1, 28). Ce « soumettez-la » est à entendre au sens de tout le travail d’humanisation de son milieu de vie par l’homme. Ce travail s’insère dans une connaissance globale de l’équilibre de l’écosystème pour savoir l’accomplir dans une vision globale du monde et du cosmos dans son ensemble. Comme l’a bien compris et affirmé Francis Bacon, « on ne commande à la nature qu’en lui obéissant ». Il faut pouvoir, par le travail, rentrer dans cette conception globale qui veille à l’équilibre nécessaire pour que l’action de l’homme sur la nature ne porte pas préjudice aux générations présentes et futures.
En outre, comme l’exprime Jean-Paul II, « ce processus est également universel : il concerne tous les hommes, chaque génération, chaque phase du développement économique et culturel, et en même temps c’est un processus qui se réalise en chaque homme, en chaque être humain conscient » .2
Père Colbert GOUDJINOU
Directeur de l’IAJP/CO
1 - JEAN-PAUL II, Encyclique LaboremExercens, n°6 § 5.
2 - JEAN-PAUL II, Encyclique LaboremExercens, n°4.