Cette rencontre s’est déroulée à la grande salle de conférence du Chant d’oiseau et a porté sur le thème suivant : « Réflexions critiques sur le type d’homme pour la gestion des institutions dans le contexte démocratique béninois : état des lieux, analyses et esquisse d’un modèle de citoyen ». Elle a été animée par Monsieur Prudent Victor TOPANOU et modérée par Monsieur Fawaz AYAH.
Brève présentation du conférencier et du modérateur
Monsieur Prudent Victor TOPANOU est Maître de conférences de sciences politiques des Universités et Enseignant-chercheur à l’Université d’Abomey-Calavi. Il est auteur de deux ouvrages édifiants, l’un publié en 2012, intitulé Boni YAYI ou le grand malentendu ; l’autre, en décembre 2013 : Introduction à la sociologie politique du Bénin. Il est aussi un acteur politique. Président du Front Uni pour la République (FUR), il a exercé de hautes fonctions politiques au Bénin ces dernières années, notamment en qualité de Secrétaire Général du Gouvernement et en tant que Garde des sceaux, Ministre de la justice, de la législation et des droits de l’homme et porte-parole du gouvernement.
Monsieur Fawaz AYAH est journaliste-reporter, spécialisé dans les questions de paix, sécurité et gouvernance démocratique. Il est aussi un consultant indépendant en médias et communication et est actuellement l’Attaché de presse du préfet des départements de l’Atlantique et du Littoral.
Résumé de la conférence-débat
Monsieur Prudent Victor TOPANOU est persuadé que le problème fondamental du béninois, c’est sa conception de l’Etat ; une conception péjorative qui considère l’Etat comme un gâteau à plusieurs tranches dont chacun a le droit de prendre sa part. La conviction du professeur se fonde non seulement sur l’observation des faits quotidiens, mais aussi sur son expérience. De ce préalable, il a établi un diagnostic sans complaisance de ce qu’est devenue la société béninoise ; une société où l’argent et la médiocrité ont pris le pas sur les valeurs et l’excellence ; une société gangrénée par la corruption et la mauvaise gouvernance.
Selon le conférencier, le drame béninois qui se joue sous nos yeux et dont nous nous accommodons fort malheureusement, souvent, résulte sans conteste de la relation que les individus entretiennent avec l’Etat et la perception qu’ils en ont. Cette perception est si ancrée dans nos moindres habitudes et réflexes que nous concevons inconsciemment que gouverner rime avec piller. Cela se justifie d’autant que les populations prennent les périodes électorales comme des moments où les acteurs politiques doivent leur partager un peu de ce qu’ils ont « amassé ». C’est donc logique que l’impunité soit devenue la « politique publique la plus consensuelle ». Dans ce contexte déliquescent, où l’Etat a de la peine à assurer la sécurité individuelle et collective, une de ses prérogatives originelles, et où domine ce que les béninois eux-mêmes ont appelé la « béninoiserie », on assiste à « l’institutionnalisation de la méfiance ». Les béninois n’ont confiance en personne, ni en leurs concitoyens, ni en leur Etat. « Comme si l’être béninois n’était plus capable du bien ; comme s’il n’était que capable du pire. »
Pour Monsieur Prudent Victor TOPANOU, ce qu’il faut extirper du béninois, c’est sa conception de l’Etat. A preuve, il fait observer que le même béninois qui travaille avec intégrité et abnégation dans un système peut devenir l’indécrottable paresseux et corrompu dans un autre. Il ne croit pas en un type de béninois, car « essayer d’uniformiser les hommes conduit irrémédiablement à des dérives totalitaires ». Cependant, il estime qu’on peut convaincre les hommes à partager une même philosophie de l’Etat. Et pour y parvenir, il propose deux choses.
La première : les assises nationales sur l’Etat afin de s’entendre sur la nature, les fonctions et les moyens de l’Etat. La seconde : l’introduction dans les programmes éducatifs de curricula sur l’Etat et les valeurs citoyennes et républicaines.
La communication, présentée en 45 minutes, a suscité beaucoup de questions et de contributions sur les limites de la démocratie, le rôle de la famille dans la formation de l’individu, le modèle de citoyen-type, l’avenir du Bénin, les savoirs endogènes et les possibilités de sortir le Bénin de ces tares.
Conclusion
Les discussions ont été très enrichissantes, parfois vives. Elles se sont poursuivies même après la conclusion du modérateur et du Père Colbert GOUDJINOU, Directeur de l’IAJP/CO ; toute chose qui montre l’intérêt du thème pour les participants.