Aperçu global du thème de 2018 : « LA CONSCIENCE DÉMOCRATIQUE : DEVOIR DE CITOYENNETÉ ÉCOLOGIQUE INTÉGRALE »
LES CONFÉRENCES SOCIALES MENSUELLES DE L’IAJP
Année 2018
1. De l’état de la question
Les conférences sociales mensuelles de l’année 2017 nous ont donné l’opportunité d’explorer le lien « Travail » et « Démocratie » dans un Bénin qui cherche à conforter sa culture démocratique issue de l’historique Conférence des Forces Vives de la Nation de février 1990. Aussi, plusieurs événements majeurs éveillant sur des enjeux sensibles de la citoyenneté nationale et mondiale ne manquent pas d’interpeller. Au plan mondial, ces derniers temps, nous pouvons évoquer la conférence sur le climat, la COP 21 à Paris au Bourget, du 30 novembre au 12 décembre 2015. La COP 21 n’est autre que la 21e Conférence des Parties de la Convention-Cadre des Nations Unies sur les changements climatiques. Elle a réuni les 195 pays signataires de cette Convention (dont le Bénin) qui reconnaissent par-là la nécessité de lutter contre le changement climatique ; d’où l’importance de l’engagement de chaque nation.
Au plan national au Bénin, on peut noter l’effort initié en faveur du cadre de vie à travers le réaménagement des espaces publics entrepris depuis le début de l’année 2017. En s’élevant au-dessus des polémiques liées à cette problématique, il faut y noter le lien intrinsèque entre l’homme et son environnement, lien auquel l’on ne saurait rester indifférent en toute responsabilité. L’impact de l’environnement sur la vie est déterminant, car il en influence la qualité. En effet, un cadre où l’insalubrité est à son comble est le lieu où peuvent proliférer les microbes et agents pathogènes vecteurs de diverses maladies. Aussi, la mauvaise gestion des ressources naturelles, les feux de végétation, les déchets de tout genre et l’usage de certains types de produits chimiques au niveau domestique ou pour l’agriculture sont autant de menaces à l’environnement.
Devant les diverses situations où notre écosystème est exposé à des influences négatives de toutes sortes sous l’action de l’homme, il importe d’assumer au mieux ses responsabilités pour œuvrer à inverser progressivement la tendance négative sur l’environnement de la part de l’homme. La conscience accrue de la question écologique aujourd’hui n’est pas également partagée. Elle porte même à observer globalement quatre types d’attitudes que nous caractériserions en autant de pathologies. Ce sont :
1.L’indifférence, fruit de l’ignorance de l’urgence écologique ;
2.Le manque d’espérance, d’implication et d’engagement social qui font prétendre de ne pas être concerné. On pense qu’il revient spécifiquement aux responsables étatiques et aux grandes rencontres internationales (la COP 21 et autres) de chercher les solutions, et l’on s’enferme dans un égoïsme irresponsable ;
3.L’idolâtrie qui résume tout en l’obéissance aux règles environnementales. Or, on doit savoir que les règles ne sont pas une fin en soi mais des moyens ;
4.L’excès puritain culpabilisant : les autres sont considérés comme des pollueurs.
L’attitude juste consiste plutôt à construire avec tous, dans le dialogue, le don de soi et l’accueil des autres. Il ne nous faut, ni hypocrisie, ni culpabilisation mais responsabilité avec les autres et don de soi. Le Pape François l’exprime bien dans la lettre encyclique Laudato si’ :
La culture écologique ne peut pas se réduire à une série de réponses urgentes et partielles aux problèmes qui sont en train d’apparaître par rapport à la dégradation de l’environnement, à l’épuisement des réserves naturelles et à la pollution. Elle devrait être un regard différent, une pensée, une politique, un programme éducatif, un style de vie et une spiritualité qui constitueraient une résistance face à l’avancée du paradigme technocratique .
C’est à cette œuvre éducative environnementale que nous voulons nous engager avec chacun et avec tous. Vivre sa responsabilité de citoyen, dans un pays démocratique, va en effet au-delà des questions de suffrage durant les élections. Il implique aussi à une éthique de responsabilité du monde et conséquemment à l’attention à son environnement dont l’impact est décisif sur la qualité de vie. Et pour une approche globale et épanouissante de tout homme et de tout l’homme dans la question écologique, les convictions religieuses, dans ce qu’elles portent de meilleur pour l’humanité, sont à mettre à contribution. L’homme a besoin d’être dans la création avec son Créateur, telle l’image de la « tempête apaisée » que nous présente l’évangile (Cf. Mt 8, 23-27). De fait, la dimension spirituelle n’est pas marginale dans sa contribution à inverser la tendance actuelle de crise écologique et l’on peut interroger diverses traditions religieuses et culturelles dans ce qu’elles portent de fondamentalement promouvant pour l’écologie.
Notre aventure cette année 2018 nous conduira dans une démarche d’éducation pratique à voir comment faire davantage de chacun de nous un acteur engagé à une nouvelle culture écologique intégrale chez nous. Partant de la conscience démocratique qui ouvre à une participation personnelle accrue au bien-être social et du meilleur de la culture écologique que portent nos traditions culturelles et cultuelles, nous verrons comment nous ouvrir à une nouvelle citoyenneté écologique où autant les motivations profondes de don de soi que la perception d’un enjeu aussi mondial nous engagent au niveau local en vue du global.
Ainsi, la thématique annuelle de réflexion est : « LA CONSCIENCE DÉMOCRATIQUE : DEVOIR DE CITOYENNETÉ ÉCOLOGIQUE INTÉGRALE ». Nous aurons au programme, sept conférences sociales mensuelles, un atelier de réflexion et de formation et un symposium national. Tel est le cadre d’approfondissement de nos échanges.
2. Des thématiques à approfondir
Les conférences sociales mensuelles sont ouvertes à tous pour leur formation. Elles conservent leur forme habituelle de deux heures d’échanges autour de trois principaux volets.
2-1. Volet 1 : De la conscience démocratique à la culture éco citoyenne
Une conscience démocratique vécue de façon responsable implique le sens d’appartenance et le devoir de participation. Dans ce sillage, on voit le nécessaire engagement citoyen pour les questions d’ordre écologiques.
1er thème :La participation citoyenne en contexte démocratique : un effort d’intégration au cosmos. (18 janvier 2018)
Dans la tradition judéo-chrétienne, on peut recourir aux sources bibliques riches de traditions de soin à l’environnement (Cf. le Chapitre II de la lettre encyclique Laudato si’ ; un passage comme Dt 22, 4.6 par exemple). Ce développement mettra spécifiquement en exergue comment traditionnellement l’être citoyen est une école où l’on apprend une certaine harmonie avec le monde qui nous entoure. Sans prêcher un retour au passé, en nostalgique d’un paradis perdu, il s’agira de considérer les aspects positifs d’une culture de la nature depuis les valeurs endogènes environnementales jusqu’aux attitudes pertinentes pour notre temps.
2è thème : La citoyenneté écologique, un style de vie personnelle et sociale face aux défis environnementaux actuels. (15 février 2018)
Les diverses crises écologiques que traversent notre monde depuis les dérèglements climatiques jusqu’aux catastrophes naturelles de tout genre sont autant de phénomènes qui interpellent par rapport à la responsabilité de l’homme. Vivre aujourd’hui la conscience citoyenne dans un monde où l’on réalise à jamais que « tout est lié » doit pouvoir nous sortir de l’égoïsme sous toutes ses formes pour devenir des éco citoyens, en commençant par le niveau de l’implication personnelle pour un impact local et global. Quels sont les défis environnementaux ? Quelles sont les attitudes personnelles à requérir, au regard de la perception de ces défis ? Comment la société elle aussi peut-elle jouer sa partition ?
2-2. Volet 2 : La question environnementale au Bénin
Considérant que « tout est lié » dans le monde, le Bénin, dans une conscience de soi et des difficultés qu’il rencontre au niveau environnemental, a besoin de connaître en quels termes se pose la question environnementale chez lui, pour savoir proposer des solutions qui s’adaptent le mieux à sa situation. C’est à une telle connaissance circonstanciée aux réalités béninoises, mais dans un esprit d’ouverture au monde, que nous consacrons ce deuxième volet.
3è thème : Gestion des espaces publics au Bénin : quelles politiques pour une citoyenneté écologique ? (15 mars 2018)
Quel type de citoyen sommes-nous au Bénin ? Notre éducation au Bénin porte-t-elle le souci de l’écologie ? L’attitude générale quant à la gestion des espaces publics chez nous devrait en témoigner. Comment travailler de façon pratique et pragmatique à cette prise en compte de l’environnement dans nos préoccupations ? Quelles sont les dispositions et normatives étatiques dans ce sens aujourd’hui chez nous ? Que faire pour passer des textes à la réalité ?
4è thème : L’hygiène et la salubrité chez nous, un appel à une citoyenneté écologique. (19 avril 2018)
L’observation de nos villes et villages laisse un spectacle peu rassurant quant à l’hygiène et à la salubrité. La gouvernance actuelle, dans son désir d’un « Nouveau Départ » pour notre pays se voudrait de faire comme un temps pour faire la « rupture » d’avec les pratiques antérieures jugées, à tort ou à raison inadéquates. Qu’est ce qui entre en ligne de compte avec une telle discontinuité positive pour notre pays au niveau des dispositions pour une meilleure hygiène et salubrité chez nous ? Quelle est notre participation citoyenne à ce sujet ? Que pouvons-nous faire pour finalement observer des changements dans notre pays quant à l’hygiène et à la salubrité ?
5è thème : La problématique de la gestion des déchets dans la cité : à quand la fin de cette situation inconfortable ? (17 mai 2018)
Bien des environnementalistes béninois observent des pratiques peu consonantes d’avec les exigences sanitaires dans beaucoup de domaines : depuis le mélange des déchets de tout genre jusqu’aux intoxications liées aux vidanges sceptiques et aux résidus de piles ou batteries chimiques. Nous ne saurions oublier les épaves de toutes formes provenant de l’occident ou d’ailleurs et l’usage incontrôlé des matières plastiques. Existe-t-il des dispositions pour la collecte des déchets dans nos quartiers de sorte que la ville et le village habités ne deviennent pas en même temps un pandémonium ? Note-t-on une conscience de ces enjeux dans des mises en place pour la différenciation des déchets à la collecte ?
Après avoir posé les considérations de base qui se sont ouvertes aux réalités béninoises, le dernier volet se présente comme le lieu d’espérance pour des perspectives plus élevées
2-3. Volet 3 : Pour une écocitoyenneté porteuse d’espérance
Les diverses approches précédemment développées ne seraient opérationnelles et ne deviendraient culture chez nous, que si le lieu d’enculturation qu’est le creuset de l’école à divers niveaux et l’être tout entier ne sont engagés. Ce dernier volet se veut non seulement une synthèse mais surtout une ouverture du sujet vers une perspective systématique et intégrale.
6è thème : L’école et l’université au service de l’écologie : une œuvre éducative de cohérence. (21 juin 2018)
L’expérience démocratique en soi signifie capacité de se mettre en jeu en vertu de la liberté reconnue et exercée par chacun et grâce à la culture de l’esprit d’initiative et de créativité. Accueillir cela, l’encourager, tel doit être l’un des fruits d’une réelle démocratie dans tous les domaines de la vie sociale. C’est sur un tel esprit démocratique qu’il faut savoir compter pour une efficacité dans les initiatives en faveur de la saine gestion de l’environnement. L’école et l’université ont alors besoin de jouer leur partition quant à une question vitale comme celle de l’environnement. L’importance de l’école et de l’université se perçoit aisément à l’aune de ces propos que confiait un sage chinois à son empereur :
Si vous voulez détruire un pays, inutile de lui faire une guerre sanglante qui pourrait durer des décennies et coûter cher en vies humaines. Il suffit de détruire son système d’éducation et d’y généraliser la corruption. Ensuite, il faut attendre vingt ans et vous aurez un pays constitué d’ignorants et dirigé par des voleurs. Il vous sera très facile de les vaincre .
Analogiquement à une telle pensée sur l’importance déterminante du système éducatif, on peut dire que la victoire, le triomphe d’une nouvelle culture environnementale passera par l’école. Quelle est la place d’une culture environnementale dans les programmes et parcours pédagogiques chez nous ? Sent-on une évidence de la question environnement positivement appliquée en visitant les écoles et lieux de formation ? Que faire pour des choses nouvelles dans ce domaine de l’éducation pour une véritable culture écologique ?
7è thème : Vivre d'une foi incarnée, c'est aussi prendre soin de son environnement (18 octobre 2018)
Cette conférence nous permettra de voir comment conjuguer de façon réaliste citoyenneté et vécu d’une foi. Dans une Afrique si riche de religion, c’est l’occasion de s’interroger sur l’implication sociale de la foi. Aussi le sérieux d’une vie de foi ne devrait-il pas se mesurer à sa capacité de contribuer aux transformations sociales qualitatives ? Sans se muer en une idéologie politique, le réalisme de la foi est dans son attention à tout ce qui touche à la vie de l’homme dans la société. Telle est la dimension de l’incarnation de la foi. De cette incarnation vient conséquemment l’implication qu’elle favorise pour ce qui est du soin à prendre de l’environnement qui rend possible la paix nécessaire pour être en contact avec la Transcendance. Vivre d’une foi incarnée, ne serait-ce pas également dans le soin à prendre de l’environnement ? Que faisons-nous en tant qu’homme de foi pour ne pas rester indifférents dans l’engagement citoyen qu’exige la foi vécue ? On peut mettre en présence deux ou trois tenants de religion pour mettre en exergue et évaluer concrètement l’aspect environnemental que leur obédience religieuse encourage. On verra alors comment partir du Dieu contemplé dans les choses créées au Dieu honoré dans le soin de la création à nous confiée.
Fait à Cotonou, le 04 septembre 2017
Abbé Dr. Colbert GOUDJINOU
Directeur de l’IAJP/CO
[1] FRANCOIS, Lettre Encyclique Laudato si’, n°111.
[2] Cf. http://lenouvelliste.com/lenouvelliste/article/157957/Quand-la-corruption-destabilise-une-nation-1re-Partie, consulté le 4.09.17.