Aperçu global du thème de 2020
« L’ENGAGEMENT CITOYEN EN CONTEXTE DEMOCRATIQUE »

LES CONFÉRENCES SOCIALES MENSUELLES DE L’IAJP
Année 2020

1. De l’état de la question

L’année 2019 nous a donné l’opportunité de réfléchir sur « le travail, l’entrepreneuriat et la spiritualité en contexte démocratique, tout est lié ». En restant dans la logique de grandir chaque année un peu plus par l’affermissement progressif d’une véritable culture démocratique, nous nous proposons cette année 2020 de travailler sur diverses implications de l’engagement citoyen en contexte démocratique.

Les événements qui ont marqué notre pays dans le cadre de l’élection législative 2019, loin de nous décourager, doivent plutôt devenir une occasion de revisiter notre histoire pour examiner lucidement le chemin parcouru et en tirer des leçons. Dans toute vie d’ailleurs surviennent des crises de croissance qui, surmontées comme il faut, confirment la maturité et confèrent de l’assurance pour la suite de la marche. C’est pourquoi nous ne voulons ni méconnaître la réalité ni nous morfondre sur le passé. Car : 

A trop considérer ce qui ne va pas, on risque l’usure du regard et du cœur, cette sorte de repli insidieux sur la seule négativité critique, qui a pour premier défaut de rendre chagrin, et de disqualifier par là même pour les tâches de l’éducation[1].

C’est donc portés par l’espérance que nous entreprenons de relire notre histoire par rapport à l’engagement citoyen dont nous avons pu faire preuve jusque-là. Un élément qui a relativement beaucoup joué est notre rapport à l’argent, depuis les rouages de la gestion politique jusque dans la vie sociale tout court. Une situation qui peut aussi interpeller est celle de la formation de la conscience citoyenne, au point où l’on réalise que notre pays est ce que nous en faisons dans nos diverses responsabilités. Si le syndicalisme joue un rôle spécifique et essentiel dans notre expérience démocratique, que pouvons-nous en dire aujourd’hui et comment l’orienter au mieux ? Et que dire des partis politiques de 1990 à nos jours ? Le combat citoyen pour un Bénin dont nous soyons fiers nous préoccupe-t-il ? En tant que citoyens, c’est à nous qu’il revient de collaborer à une vie meilleure chez nous. En avons-nous conscience ?

Ce sont ces questions et bien d’autres encore que les conférences sociales mensuelles de l’année 2020 nous donneront l’opportunité d’affronter. Nous pourrons ainsi relire ensemble notre expérience démocratique pour en faire un tremplin d’engagement citoyen de la part de chacun de nous. Voilà ce qui inspire la thématique annuelle de réflexion intitulée : « L’ENGAGEMENT CITOYEN EN CONTEXTE DEMOCRATIQUE ». Nous aurons au programme, sept conférences sociales mensuelles comme cadre d’approfondissement de nos échanges.

2. Des thématiques à approfondir

Les conférences sociales mensuelles sont ouvertes à tous pour la formation citoyenne. Elles conservent leur forme habituelle de deux heures d’échanges autour de trois principaux volets.

2-1. Volet 1 : Les éléments fondateurs de l’expérience démocratique

L’avènement du renouveau démocratique au Bénin en 1990 est de façon indéniable un changement de cap pour un mieux-être et un mieux-vivre intégral. L’expérience démocratique qui en a découlé et qui se vit depuis bientôt trois décennies est diversement appréciée, en raison des pratiques. L’enjeu de ce volet est de contribuer à revisiter de façon critique ces trente années d’expérience du point de vue anthropologique, socio-politique et éthique. Les thèmes prévus à cet effet sont :

  • 1er thème : L’expérience démocratique : des structures mentales à l’action citoyenne  (23 janvier 2020)

La force de l’expérience démocratique béninoise tient également dans les valeurs qui la portent et dans le rêve du style de vie sociale désirée par les pères fondateurs. Mais, entre l’idée portée par les fortes convictions et l’agir concret, il y a parfois comme un hiatus. Notre mode de fonctionnement mental reste à réorienter. Un travail de fond est à faire par l’éducation pour un agir en cohérence avec les valeurs. Si l’action citoyenne est attendue dans le cadre de l’expérience démocratique, nos structures mentales trop marquées par une grande fermeture sur soi peinent à donner le primat au bien commun. Un concept comme celui de mɛjɔmε (mèdjomè) c’est-à-dire une personnalité corporative, une personne qui peut en engendrer une autre au nom des valeurs qu’elle porte, est en jeu. Revisiter la charge éthico-sociale du mèdjomè chez nous peut donner du pesant d’or à la personne sur qui l’on compte pour l’édification d’une démocratie aux valeurs culturelles béninoises et pour une action citoyenne transformante.

  • 2è thème : Restaurer les valeurs patriotiques : comment ? (20 février 2020)

Aucune nation ne peut durablement se construire sans les fondamentaux que sont les valeurs patriotiques. L’une de ces valeurs est le sens de l’histoire. En pensant à cet élément fédérateur de notre histoire qu’est la Conférence des Forces Vives de la Nation de février 1990, il est essentiel de se demander comment nous travaillons à ce que cette histoire se perpétue, depuis les éléments matériels qui y renvoient jusqu’au vécu préservant l’Etat de droit. Aussi quelle conscience civique avons-nous pour édifier durablement notre démocratie ? Nous aimons-nous assez dans l’amour de notre patrie ? Le sens de la patrie garde-t-il un vrai primat dans notre échelle des valeurs ? L’antidote à l’état de déliquescence actuel de la société n’est-il pas dans la nécessité de restaurer une vision intégrale du développement ? Les valeurs patriotiques sollicitées sont à insérer dans un contexte de globalisation où le monde est devenu un village planétaire.

  •  : La conscience citoyenne, un défi relancé (25 juin 2020)

Peut-on bâtir une nation sans la participation réelle des citoyens qui se reconnaissent comme tels et se déploient à l’œuvre de construction commune ? La notion de citoyenneté, à tort ou à raison, est attribuée à toute personne et évoquée dans différents débats comme une panacée face aux maux de la société. Qui désigne-t-on par le terme citoyen ? Que dire de la conscience citoyenne dans un pays où l’incivisme, la corruption et la mauvaise gouvernance rivalisent avec la promotion des valeurs morales et civique ? En définitive, en parlant de la conscience citoyenne, sommes-nous en présence d’un défi ? Si tel est le cas, comment relever ce défi ?

2-2. Volet 2 : L’expérience démocratique aux prises avec les institutions et les mœurs

Après la série de communications sur les éléments fondateurs de l’expérience démocratique béninoise, ce deuxième volet permettra un approfondissement à d’autres niveaux. En effet, au-delà des valeurs ayant porté le vécu démocratique chez nous, nous voici aux prises avec des institutions et des styles de comportement qui interrogent. Ce volet donnera l’occasion de réfléchir sur les aspects politique, économique et social. Trois thèmes serviront à l’exploration de ce volet :

  • 4è thème : La situation du système partisan au Bénin : histoire et perspectives transformantes (23 juillet 2020)

La période de l’élection législative de 2019 a permis de mettre en exergue l’un des fondamentaux de toute démocratie, le système partisan. Malgré le désir d’imprimer une tournure plus honorable à cet aspect de la vie socio-politique de notre pays, la question demeure de savoir si nous avons déjà des positionnements idéologiques assez tranchés pour l’animer. Si un processus est en cours avec la nouvelle charte portant reconnaissance des partis politiques au Bénin, du chemin reste sans doute à faire vers des configurations moins débridées et donc plus honorables pour notre démocratie. Cette conférence se proposera de revisiter la situation du système partisan au Bénin, à travers le parcours historique et les perspectives qui offrent objectivement un cadre politique plus constructif.

  • 5è thème : Le citoyen béninois et l’argent : comment reconquérir la primauté des valeurs humaines (17 septembre 2020)

« L’homme vaut plus par ce qu’il est que par ce qu’il a », nous enseigne le Concile Vatican II (Gaudium et Spes35, 1). Et pourtant, l’avoir matériel, avec au premier rang l’argent, montre son importance presque indéniable dans la société. L’on doit reconnaître tout de même que dans la société africaine traditionnelle le sens de la gratuité et le don désintéressé de soi rivalisaient avec l’actuelle indécente puissance de l’argent omniprésent. Si les réalités matérielles et l’argent sont nécessaires, doivent-ils devenir les références exclusives de la vie, une fin en soi ? Comment le glissement s’est-il opéré au plan socio-anthropologique et éthique pour que le citoyen béninois se dépense bien volontiers pour le matériel, assez souvent au détriment de la personne humaine ? Que faire pour revenir au primat de l’être sur l’avoir, sans rien enlever au réalisme des nécessités matérielles ?

  •  : Le mouvement syndical : entre combat pour le sens et instrumentalisation politique  (08 octobre 2020)

L’un des indicateurs du bon fonctionnement de l’expérience démocratique est la capacité pour les employés de différents secteurs de se constituer en association pour revendiquer leurs légitimes droits. Ils se constituent donc en « syndicats » et leur existence est justifiée dans la mesure où ils assument leurs devoirs pour en espérer légitimement des droits. Mais, dans un contexte où le dialogue social est continuellement exposé à de nombreuses interférences d’ordre politique, l’on peut s’interroger sur les perspectives de l’action syndicale. Sommes-nous en présence de combats pour le sens dans le corps de métier qui est le nôtre et dans lequel l’on a droit à un salaire digne ? Ne devenons-nous pas parfois, comme syndicats, des instruments aux mains ou à la solde des politiques ? Comment faire retrouver ses lettres de noblesse au combat syndical ? L’enjeu, c’est notre fierté de travailleur et l’amour authentique de notre pays. 

2-3. Volet 3 : La spiritualité comme une opportunité pour la qualité d’engagement social

L’interpellation de Saint Jacques évoquée dans l’argumentaire des conférences sociales de 2019 revient ici en écho : « Montre-moi ta foi qui n’agit pas, moi c’est par mes œuvres que je te montrerai ma foi » (Jc 2, 18). Elle ne manque pas non plus de retentir dans la vie de tout homme soucieux d’une religiosité incarnée. Pour ainsi dire, la qualité de la spiritualité s’apprécie aussi à l’aune de l’engagement social. L’on ne saurait dire être en bonne relation avec le Transcendant sans impacter positivement son milieu de vie et de travail. D’ailleurs, que vaut une foi qui ne se risque pas sur le terrain concret de l’action, dans le champ de la vie sociale ? Dans ce sillage, le troisième et dernier volet de nos conférences s’articulera autour de la spiritualité comme une opportunité pour un engagement social de qualité. 

  • 7è thème (panel) : Nos convictions religieuses au service de l’engagement citoyen : foi et engagement au service de la société. (22 octobre 2020)

Considérant la vitalité religieuse de l’Afrique, c’est le lieu de se demander ce que la spiritualité apporte à la vie sociale. L’œuvre de cohérence attendue de chaque obédience religieuse est sa capacité à offrir un engagement certain et cohérent au service de la société. Est-ce une utopie ou la sphère religieuse au Bénin offre des réponses positives à cette attente ? La foi qui porte notre agir religieux reste-t-elle loin des réalités sociales ou s’y incarne-t-elle en les prenant en charge ?

Fait à Cotonou, le 21 novembre 2019

Abbé Colbert GOUDJINOU

Directeur de l’I.A.J.P./ C.O.  


[1] LENA, M., L’Esprit de l’Education, Edition Communio Fayard, Paris 1981, 25.

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